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Fils et filles d'Alzheimer ...

... petits-enfants, conjoints/partenaires, parents, amis, soignants et autres proches de malades d'Alzheimer, 

Notre combat : que les personnes frappées par la maladie soient prises en charge avec compétence, humanité et dignité jusqu'au bout.  Partageons ici informations et expériences, bonnes ou mauvaises, qui éviteront peut-être à d'autres certaines mésaventures douloureuses et coûteuses. Voyez avec Carpe Diem ce qui peut se faire quand la volonté existe.  
                                                 

filledAlzheimer@yahoo.fr           <le 22 janvier 2007>  

N.B: Si vous avez du mal à lire sur fond noir, 
il vous suffit de sélectionner le texte pour l'avoir 
en bleu et blanc.

 

15 février 2007 4 15 /02 /février /2007 18:23

<<Texte rédigé le 15 décembre 2006>>


ALZHEIMER, GRANDE CAUSE NATIONALE 2007 :

ASSEZ DE PROCLAMATIONS, DES ACTES !

Lettre ouverte aux candidats à la présidence de la république
et aux décideurs actuels

Ce qui suit n'est pas un exposé théorique
mais l'histoire vécue d'une expérience porteuse d'espoir.
C'est aussi un CRI D'ALARME, avec la suggestion de quelques pistes à explorer.

<<Mes coordonnées et celles du cadre de santé à contacter le cas échéant figurent sur l'original-papier>>
 
TEXTE:
Il existe à Gaillac (Tarn), à l'EHPAD St Jean rattachée à l'hôpital public, une petite unité de vie pour personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer.  Ouverte en février 2005 dans un bâtiment réhabilité et sécurisé, elle accueille 15 résidants dans des chambres individuelles dotées chacune d'un bloc sanitaire complet (il y a aussi 2 chambres doubles). 

Le personnel y est presque en nombre suffisant, puisque les effectifs approchent le ratio de 1 soignant par résidant officiellement préconisé pour les services de grands dépendants.  Tous les soignants et soignantes se sont portés volontaires pour travailler dans cette unité "pilote", avec un projet de vie collective qui suppose la polyvalence : chacun assure non seulement les soins, mais aussi l'animation (chant, gymnastique, cuisine, jeux, peinture, etc.) selon ses aptitudes.  Les locaux sont accueillants, ensoleillés par une agréable couleur jaune d'or adaptée à la maladie, et disposés autour d'un patio où les résidants peuvent sortir dès que le temps s'y prête.  Des dîners barbecue très sympathiques y sont parfois organisés.

Les 15 résidants, 2/3 de femmes et 1/3 d'hommes, âgés d'environ 70 à 90 ans et tous atteints de la maladie d'Alzheimer à divers stades de son évolution, forment un petit groupe social.  Après 18 mois de vie commune, les manifestations d'agressivité ou autres comportements ... disons perturbateurs ont presque totalement disparu, les personnes se connaissent et sont globalement apaisées, on sent dès l'entrée que l'expression "lieu de vie" n'est pas ici un vain mot.

Idéal, direz-vous?

Non bien sûr, loin de là, il faut aussi évoquer la défiance initiale du personnel à l'égard des familles très présentes, les lourdeurs administratives, le changement de culture qu'impose au personnel le passage à un mode de fonctionnement moins rigidement "hospitalier", moins anonyme, moins routinier.  Or tout le monde n'est pas prêt à s'investir de manière polyvalente et constante auprès des résidants.  A l'unité Alzheimer, chaque soignante ou soignant, tour à tour, habille, procure les soins d'hygiène, lave le sol, aide à la marche, fait la conversation, réconforte, accompagne aux WC, fait chanter ou réciter le groupe, compte les résidants du coin de l'oeil pour vérifier que personne ne manque, sert les repas qui sont pris en salle à manger et partage la table des résidants, rattrappe le bricoleur sur le point de démonter sa chambre, évite une bagarre en séparant avec doigté deux énervés, etc. 

C'est dire la multiplicité des compétences requises pour ce travail, que le terme d'auxiliaire de vie décrirait de façon plus exacte.  Outre les savoir-faire hospitaliers, il faut avant tout une grande humanité, mais aussi une capacité d'adaptation permettant de passer sans cesse d'une tâche à une autre totalement différente et de gérer des patients ayant des handicaps de nature et de degrés divers, une vigilance de tous les instants puisqu'ici on n'utilise pas la "camisole chimique", beaucoup de créativité pour décorer les locaux et assurer des activités d'animation/stimulation pratiquement sans aucun budget, assez d'humour pour désamorcer ou supporter certaines situations, une grande résistance psychique face à la dégradation inéluctable des résidants, etc.

Le personnel a appris "sur le tas" ce qu'était la maladie d'Alzheimer (de même que l'administration de l'hôpital/EHPAD, de son propre aveu).  Et le personnel s'en tire plutôt bien.
Alors tout va bien ?

Hélas non.  Il faut savoir que cette unité pilote ne peut accueillir que 15 résidants.  Lorsqu'ils deviennent trop lourdement handicapés, les malades sont transférés dans un service généraliste de grands dépendants qui n'est plus qu'un triste "garde-vieux", pour reprendre l'expression d'un membre du personnel, moins choquante peut-être que "mouroir amélioré" ?? (amélioré parce que propre et confortable)

Ce service compte déjà 1/3 de malades d'Alzheimer, soit 5 sur 15.  Privés du jour au lendemain de toute la spécificité Alzheimer décrite ci-dessus et de toute vie sociale ou animation, ils sont réduits au service minimum. Certains sont encore relativement jeunes et pourraient rester parqués ainsi pendant des années.

L’inéluctable aggravation de la dépendance n'a pas été anticipée.  Rien n'a été prévu pour le malade d'Alzheimer grabataire, or il reste UN MALADE QUI A BESOIN DE STIMULATIONS ET UN HUMAIN QUI A DROIT A SA DIGNITE.

Pire : l'hôpital de Gaillac construit une nouvelle aile qui comprendra un nouveau service Alzheimer.  Il est prévu d'y accueillir deux fois plus de résidants avec moins de personnel que dans le service "pilote" actuel.  On sera donc en régression par rapport à ce qui se fait actuellement et qui devait servir de laboratoire, pour reproduire ensuite les bonnes pratiques et améliorer ce qui devrait l'être.

Pire encore : selon la DDASS, l'unité Alzheimer actuelle serait en sureffectif !  Vous avez bien lu : il s'agit d'un service de grands dépendants, les préconisations officielles pour les services de grands dépendants en France sont de 1 soignant par résidant, et des instances officielles jugent, quand un service s'approche tout juste de ce ratio préconisé, que ledit service est en sureffectif!  On croit rêver, ou plutôt cauchemarder!

Le fonctionnement actuel de l'unité Alzheimer est donc menacé.

MESDAMES ET MESSIEURS LES CANDIDATS
A LA PRESIDENCE DE LA REPUBLIQUE,
ENGAGEZ-VOUS PUBLIQUEMENT

MESDAMES ET MESSIEURS LES DECIDEURS,
AGISSEZ D'URGENCE

POUR DES FINANCEMENTS PUBLICS SUFFISANTS

POUR DES MESURES FISCALES EQUITABLES

AFIN D'ASSURER UNE FIN DE VIE DIGNE
A NOS AINES, ALZHEIMER ET AUTRES

<<A suivre : quelques pistes à explorer>>


 QUELQUES PISTES À EXPLORER

Mesures préconisées pour les EHPAD de Gaillac, mais valables également ailleurs :

? Valoriser et reconnaître les acquis du personnel formé sur le tas, dans une démarche-qualité prenant en compte la satisfaction du client (résidants, familles)
? Pérenniser les contrats précaires lorsque le personnel donne satisfaction.
? Former le personnel de tous les services, mais en particulier celui des services de grands dépendants, à l'
HUMANITUDE* (comportement, soins, animation).
? Recruter du personnel formé à la maladie d'Alzheimer, en suffisance pour atteindre le ratio de 1 soignant par résidant, mais surtout
? Faire mieux avec le personnel existant, en créant une culture de la BIENTRAITANCE.

Réflexions :

? Il faut impérativement des financements publics suffisants pour assurer un service public de qualité.  L'Etat doit s'engager massivement au lieu de se désengager. 
? Mais aussi on peut faire mieux avec le personnel existant.  Les différents intervenants doivent agir en coordination (ex. au niveau administratif, on construit une nouvelle aile, mais on ne demande pas l'avis de ceux qui travaillent dans l'existant sur l'aménagement des nouveaux locaux! Au quotidien, une mauvaise communication** entre médecin, nutritionniste, cuisine, lingerie, administration, infirmiers/infirmières, aide-soignant(e)s et autres intervenants et familles crée inutilement des frictions préjudiciables aux résidants, mais aussi aux conditions de travail des soignants.)
? Et surtout, il faudrait cesser de comptabiliser la rentabilité du travail des soignants comme s'il s'agissait de la production d'objets.  Tel que décrit ci-dessus, le travail multiforme requis dans une unité de vie de grands dépendants n'entre pas dans les schémas préétablis de gestion du temps et de productivité.


Recommandations plus générales  :

? Création de PETITES unités Alzheimer (15 résidants est une bonne taille), si possible avec jardin sécurisé comme aux Hortensias.
? Intégration de la notion d'HUMANITUDE* dans les études médicales et para-médicales.
? Formation du personnel autre que gérontologique à la maladie d'Alzheimer, car actuellement un patient Alzheimer qui est aussi cardiaque, par exemple, déconcerte médecins et infirmières lorsqu'il doit être hospitalisé dans un service de cardiologie ...
? Cesser de ne considérer que la rentabilité immédiate.  Recruter et former du personnel coûte, certes, mais à une échelle économique plus large cela rapporte aussi : plus de recettes fiscales, plus de consommation, moins d'indemnités de chômage, meilleure harmonie sociale, etc.  Le secteur des soins à la personne est un important gisement d'emplois non délocalisables!

 Mesure urgente d'équité fiscale :

? Instauration d'un crédit d'impôt au lieu d'une réduction d'impôt pour les services à la personne, de manière à mettre fin à l'iniquité actuelle déjà dénoncée à maintes reprises, et de diverses parts : l'aide à domicile coûte deux fois plus cher à une personne non imposable qu?à une personne imposable, qui déduit de ses impôts 50% du coût de cette aide (ceci est une simplification, mais argumentation plus détaillé à disposition). 
? Naturellement, l?APA éventuellement perçue serait déduite du montant des charges ouvrant droit à ce crédit d'impôt. 

(Voir à ce sujet l'annonce de M. De Villepin le 15/12/2006 et la marche arrière de la commission parlementaire le 21/12/2006)

NOTES:

*   Philosophie de l'Humanitude :
http://www.cec-formation.net/
http://www.agevillage.com/Article/index.jsp?ARTICLE_ID=5000
http://perso.orange.fr/cec-formation.net/philohumanitude.html

 **   Petit exemple de mauvaise communication : dans le service généraliste de grands dépendants, le médecin interdit à une résidante les liquides et les morceaux car elle ferait des "fausses routes".  Du coup, la résidante (96 ans, au régime "mixé") est privée de la délicieuse soupe de légumes quasi-quotidienne, et le plus souvent de tout légume vert. 
Or la diététicienne a bien prévu des repas équilibrés, et chacun sait, même sans être diététicien, l'importance des légumes dans une alimentation saine, et particulièrement des fibres pour une patiente qui ne marche plus !  La famille insiste pour que la soupe de légumes présente sur le chariot lui soit servie : il suffit de l'épaissir avec de la purée, servie à tous les repas, et la résidante se régale, sans la moindre "fausse route" 
Idem pour les légumes : la personne qui sert un repas refuse de servir des haricots verts, au motif que le médecin a interdit les morceaux.  La fille qui fait manger sa mère fait valoir que le médecin n'a jamais interdit les haricots verts et insiste pour en avoir, elle les écrasera elle-même à la fourchette puisque la cuisine n'en a pas mixé.  Hé bien non, il faudrait l'autorisation de l'infirmière, l'aide-soignante ne pouvant pas prendre cette responsabilité.  Naturellement l'infirmière est occupée ailleurs et le repas se termine sans haricots verts (heureusement il y avait la soupe !). 
Le surlendemain, le médecin reproche à la famille de mettre l'équipe soignante en difficulté par ses "exigences", qui seraient en contradiction avec ses propres prescriptions médicales. 
Or il n'y a aucune contradiction entre l'interdiction médicale de liquides et de morceaux et l'exigence familiale, pleinement justifiée, d'une alimentation équilibrée comportant des légumes.  Il suffit d'un peu de bon sens et de bonne volonté et les choses se passent bien. 
Cette question semble maintenant réglée, mais ce n'est qu'un exemple parmi de nombreux autres, et que de temps et d'énergie gaspillés !

<Fin du texte>

       

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